"Noir Tailleur de Pierre" Aquarelle de Jean Baptiste Dumas, vers 1850. Source : IHOI
Depuis le début de cette aventure, nous nous demandions d'où pouvait bien provenir cette fameuse toile bleue, dite "de Guinée", qui servait à vêtir les esclaves, et, après 1848, les travailleurs engagés.
Eh bien, le mystère semble en partie résolu, depuis la lecture d'un petit ouvrage, publié conjointement par les éditions Hachette et la BnF (Bibliothèque Nationale de France, une mine d'or pour les curieux!). il s'agit du petit fascicule intitulé :
Commerce des toiles bleues dites guinées, de l'industrie française de Pondichéry et métropole
Ce petit ouvrage de 69 pages est un plaidoyer adressé au gouvernement français afin de limiter la taxation sur les produits textiles pour le commerce "d'inde en Inde", c'est-à-dire de l'Inde vers la Réunion.
-
les textiles importés en Europe
Les textiles sont divers: des toiles plus ou moins grossières, à tissage très serré, comme ces basins. L'image provient d'un ouvrage en libre accès, qui relate un commerce de toiles antérieur à l'époque qui nous intéresse, mais où l'on trouve des indications très précises sur les fils utilsés et les modes de tissage.
-
Pondichery
Le "comptoir" de Pondichéry, une charmante ville sur la côte indienne de Coromandel, est l'un des territoires indiens colonisé par la France, qu'elle occupe de nouveau depuis 1815.
C'est de là que viennent la majorité des toiles bleues de Guinée, teintes à l'indigo à Pondichéry, ou dans ses environs.
-
Un commerce lucratif
Le petit ouvrage de J.P. Duchon-Doris, industriel en filature textile installé justement à Pondichéry en 1842, nous apprend une chose étonnante: la filature industrielle a été développée dans l'Inde française par... un réunionnais! Un fils de Mme Desbassyns,Eugène Panon, vicomte Desbassyns de Richemont, par une ordonnance du 26 octobre 1826, dès les débuts de l'ère industrielle.
Les fils sont expédiés en France, pour y être tissés mécaniquement à Rouen, ou Nantes, ou encore dans les Vosges, et sont ensuite réexpédiés à Pondichéry pour y être teints à l'indigo.
De là, les toiles dites "de Guinée" repartent en grande quantité à l'île de La Réunion. Une partie sert à la consommation locale, l'autre est réexpédiée au Sénégal! (d'où leur nom). Là, elles sont revendues par les marchands locaux aux Maures, et l'on retrouve ainsi ces fameuses toiles bleues qui habillent les Touaregs !
Credits - courtoisies de : ©Iconothèque Historique de l'Océan Indien IHOI - ©Musée de la compagnie des Indes de Lorient